Li grand Michel
Li grand Michel 1
Li grand Michèl èstèt in Lugsembourgjwès (dou Grand-Duché di Lugsembourg) qui d’meurèt à l’ruwe-Wôte. Si nom èstèt Michel Borck.
I travayèt au tchestia èt souvint c’èstèt li qui fièt lès comissions à Tcheslet, avou ène tchèrète à tchés.
In djou li cwîsinière lî comande d’aller qwé dès pwins èmon l’boulèdjî dèl place Sint-Rok (à Châtelet).
« Michèl, di’st-èle, en francès : Vous irez à Châtelet me chercher douze pains bine frais. S’ils ne sont pas frais, c’est inutile d’en prendre ».
Et volà nosse Michèl évôye avou s’n’atèladje.
Deûs eûres après, i rarivèt … sins pwins …
« Où sont les pains, Michel ?
Bén, Madame li cwîsinière, dji n’én.n-aî pont rapwârtè. Vos m’avî-bén dit : des pwins frèds, én-don. I gn’avèt qu’dès tchôds ! ».
N.B. : nosse grand Michèl ni conèchèt nén lès substilités du français. I n’causè qui l’alement èt … l’walon.
Maurice Chapelle
LE GRAND MICHEL
Le grand Michel était Luxembourgeois et demeurait à la rue Haute. Il s’appelait Michel Borck.
Il travaillait au château et souvent c’était lui qui faisait les courses à Châtelet avec une charrette à chiens.
Un jour la cuisinière lui commande d’aller acheter des pains chez le boulanger de la place St Roch à Châtelet.
« Michel, lui dit-elle en français : Vous irez à Châtelet me chercher douze pains bien frais. S’ils ne sont pas frais, c’est inutile d’en prendre ».
Et voilà Michel parti avec son attelage.
Deux heures après, il revient … sans pain …
« Où sont les pains, Michel ?
Eh bien Madame la cuisinière, je n’en ai pas rapporté ! Vous m’aviez bien dit : des pains frais, n’est-ce pas ! Il n’y en avait que des chauds ».
N.B. : notre grand Michel ne connaissait pas les subtilités de la langue française. Il ne parlait que le luxembourgeois et le Wallon.
Maurice Chapelle
Carte postale expédiée le 23 janvier 1911
Carte postale expédiée le 23 janvier 1911 (verso)
Michel BORCK, comme son frère Louis BORCK, émigra du Grand-Duché de Luxembourg, à Presles, ayant épousé Julienne dite Joséphine PIETTE.
Serviteur au château de Presles, ils habitèrent une maison de la rue Haute, assez près du boulanger « Batisse Bratchote » et vis-à-vis des maisons où habita Valentin MAGNELETet sa famille.
Quand je connus « li grand Michèl » c’était un homme grand, un peu voûté par l’âge, mais marchant avec un bâton, encore d’un pas alerte et en bonne santé, sachant à l’occasion siroter un « schnaps » (péket traditionnel de ses aïeux).
Ses gauloiseries étaient plaisantes à ouïr, agrémentées qu’elles étaient de l’accent germanique dont le Grand Michel n’avait pu se débarrasser… mais néanmoins faisant l’effort de parler notre patois local.
Homme humble et simple, bon et courageux travailleur, cet homme d’origine luxembourgeoise, parlant sa langue maternelle, ne s’occupa pas de sa nationalité en épousant une fille de chez nous. Tels devraient être les sentiments fraternels de tous les peuples.
Michel œuvrant chez nous, passa le reste de sa vie dans une maison de la Place Communale, sise près de la chapelle Saint-Roch.
Au
cimetière, parmi les tombes de la troisième rangée,
à gauche en entrant, nous pouvons lire une simple
inscription :
MICHEL BORCK – JOSEPHINE PIETTE
sans aucune date.
Elle reste le seul souvenir de leur passage parmi nous.